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Boost.Threads : les threads de Boost

Utiliser des threads dans ses programmes nécessite généralement une connaissance de chaque plateforme utilisée, les interfaces pour les threads ne sont pas standardisées en C++. Des bibliothèques dites portables existent, permettant de faire les liens manquants. Par exemple Boost.Threads. ♪

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Introduction

Les threads permettent d'exécuter du code en parallèle, de manière indépendante et asynchrone. Chaque thread appartient à un processus qui l'a créé, mais ils utilisent chacun le processeur comme s'ils étaient seuls. Les programmes utilisant les threads sont appelés multithreadés, les autres programmes qualifiés de monothreadés.

Les avantages des programmes utilisant les threads sont nombreux. Par exemple, l'attente d'un événement externe peut bloquer un programme et la déporter dans un thread peut permettre à l'application de répondre. Si on possède plusieurs cœurs, ou plusieurs processeurs/unités d'exécutions, paralléliser son application peut permettre d'accélérer un programme.

En revanche, les inconvénients sont tout aussi nombreux, et plus sournois. Par exemple, lorsque deux threads veulent accéder en écriture à une ressource, on ne peut garantir le résultat après les accès. On peut aussi rencontrer des problèmes d'accès aux ressources – deux threads désirant obtenir un maximum de mémoire et occupant toute mémoire disponible, mais pas suffisamment sans pouvoir la rendre –. Ces erreurs ne sont pas particulières ou rares, elles sont courantes si on ne fait pas attention. Boost.Thread essaie de remédier aux erreurs d'inattention de base.

Parmi les dernières considérations avant de se lancer, il faut noter le problème des tests et du débogage. Un programme simple, monothreadé, est simple à déboguer, tout se déroule ligne après ligne, instruction après instruction. Un programme multithreadé n'a pas cette faculté. Pendant une exécution, une instruction peut s'exécuter après une autre, puis à la suivante, c'est l'inverse. On ne peut donc pas répéter les erreurs, les versions debug n'ont pas le même comportement que les versions release…

Cette bibliothèque nécessite une version compilée de Boost.

I. Démarrer avec Boost.Threads

Utiliser Boost.Thread implique l'utilisation des versions multithreadées des bibliothèques runtime, sans quoi on retombe dans les travers exposés précédemment.

Dans le même registre, certaines fonctions de la bibliothèque standard du C++ héritées du C doivent être évitées, comme rand() - voir alors Boost.Random.

Les fonctions et classes de Boost.Thread répondent à des caractéristiques précises. Les destructeurs ne lèvent pas d'exception, les méthodes ou fonctions lèvent des exceptions de type std::bad_alloc lors d'un défaut d'allocation mémoire, boost::thread_ressource_error lors de défaut d'autres allocations ou boost::lock_error pour des erreurs de verrouillage.

Dans le même style, les classes héritent de manière privée de boost::noncopyable pour indiquer que leurs instances ne peuvent être copiées.

II. L'architecture de la bibliothèque

L'architecture de la bibliothèque est constituée de deux parties, même si d'autres sont en projet. La première contient les primitives de base pour la synchronisation, la deuxième contient les threads eux-mêmes.

II-A. Les mutex

Les mutex et leur implémentation sont actuellement sujets à discussion par le comité Boost, mais pour l'instant, ils restent tels quels.

Un mutex a deux états : locked et unlocked. Cet outil permet d'accéder à une ressource commune à plusieurs threads de manière synchrone. Avant chaque accès, on bloque le mutex de protection, et après l'accès, on débloque le mutex. Afin d'empêcher l'oubli du déblocage, fréquent et qui résulte en un blocage définitif, Boost.Threads utilise un pattern appelé Scope Locking. En fait, un objet créé sur la pile bloque l'accès et lors de sa destruction automatique à la sortie du scope, il débloque l'accès à la ressource. C'est le seul moyen utilisable avec Boost.Threads. Excessif, mais compréhensible, car totalement sûr par rapport aux exceptions.

II-A-1. Les stratégies de blocage

Plusieurs stratégies face à l'accès à un mutex par un même thread existent pour utiliser les mutex.

II-A-1-a. La stratégie récursive

Lorsqu'un thread essaie de bloquer un mutex qu'il a déjà bloqué, l'opération réussit. Cela peut être utile si une fonction d'un thread bloque le mutex et qu'une fonction appelée par cette même fonction fait de même. Les classes boost::recursive_mutex, boost::recursive_try_mutex et boost::recursive_timed_mutex utilisent cette stratégie.

II-A-1-b. La stratégie vérifiée

Lorsqu'un thread essaie de bloquer un mutex qu'il a déjà bloqué, une erreur est générée. Pour Boost.Threads, il s'agit de l'exception boost::lock_error. En revanche, aucun mutex proposé n'utilise cette stratégie, mais ce serait prévu.

II-A-1-c. La stratégie non vérifiée

Lorsqu'un thread essaie de bloquer un mutex qu'il a déjà bloqué, le thread se bloque. Cette stratégie est moins sûre que les deux précédentes, mais aussi plus rapide. D'ailleurs, beaucoup de bibliothèques utilisent cette stratégie. Aucun mutex proposé n'utilise cette stratégie, mais ce serait prévu.

II-A-1-d. La stratégie non spécifiée

Cette stratégie est simple, lorsqu'un thread essaie de rebloquer un mutex, on ne connaît pas le comportement du programme. C'est la stratégie la plus rapide et naturellement la moins sûre. Les classes de Boost.Threads boost::mutex, boost::try_mutex et boost::timed_mutex utilisent cette stratégie.

II-A-2. Les politiques

Les politiques gèrent la manière de donner l'accès aux threads demandeurs.

II-A-2-a. La politique FIFO

Cette politique consiste à donner accès au premier demandeur. Cela permet qu'un thread de haute priorité ne bloque pas l'accès à la ressource lorsqu'un thread de basse priorité en a besoin.

II-A-2-b. La politique de priorité

Avec cette politique, le thread de plus haute priorité bloque toujours le mutex en priorité. En revanche, cela signifie que les threads de basse priorité peuvent être bloqués.

II-A-2-c. La politique non spécifiée

Dans ce cas-ci, aucun ordre spécifique n'est donné aux threads désirant accéder à une ressource. Tous les mutex de Boost.Threads suivent cette politique.

II-A-3. Les concepts de mutex

Outre les stratégies et les politiques, il y a aussi des concepts de mutex – vous suivez toujours ? –

II-A-3-a. Le concept standard

Le concept standard, présent dans boost::mutex et boost::recursive_mutex implique simplement que le mutex possède un type scoped_lock qui essaie de bloquer un mutex normalement.

II-A-3-b. Le concept d'essai

Le concept d'essai, présent dans boost::try_mutex et boost::recursive_try_mutex implique que le mutex possède un type scoped_try_lock qui renvoie une exception de type boost::lock_error lorsqu'une instance essaie de bloquer un mutex ou qui tente de bloquer un mutex si une condition est vérifiée.

II-A-3-c. Le concept de temps

Le concept de temps, présent dans boost::timed_mutex et boost::recursive_timed_mutex implique que le mutex possède un type scoped_timed_lock qui permet d'appeler un mutex avec une durée ou qui essaie de bloquer un mutex si une condition est vérifiée.

II-A-4. Résumé des mutex

Voici donc un résumé des mutex proposés par Boost.Threads.

Concept

Dérive de

Modèle

Mutex

 

boost::mutex

   

boost::recursive_mutex

TryMutex

Mutex

boost::try_mutex

   

boost::recursive_try_mutex

TimedMutex

TryMutex

boost::timed_mutex

   

boost::recursive_timed_mutex

II-B. Les lock

Le but de ces concepts est de bloquer un mutex. On a déjà vu quelques versions de ces concepts, équivalents aux concepts de mutex standards, d'essai et de temps. Maintenant, Boost.Threads a décidé d'utiliser les versions Scoped, donc à savoir que des objets seront utilisés pour bloquer des mutex.

II-B-1. Qu'est-ce qu'un lock ?

Pour un type de Lock L, une instance lk et une instance constante clk, certaines expressions doivent être valides.

Expression

Effets

(&lk)->~L();

Si le mutex est bloqué, on le débloque.

(&clk)->operator const void*()

Retourne une valeur non nulle si le mutex a été bloqué par clk, 0 sinon.

clk.locked()

retourne (&clk)->operator const void*() != 0.

lk.lock()

Lève boost::lock_error si locked(). Si le mutex associé est déjà bloqué par le même thread, l'effet dépend de la stratégie du mutex. Dans le cas général, le thread est placé dans un état bloqué, puis d'attente lorsque le mutex est libéré et pourra se voir passer en état actif. Après, locked() retourne true.

lk.unlock()

Débloque le mutex associé. Après, locked() retourne false.

II-B-2. Le concept de ScopedLock

Ce concept requiert que le constructeur et le destructeur aient des effets particuliers. Ici, on considère m comme un mutex standard

Expressions

Effets

L lk(m);

Construit un objet lk, associe le mutex m et appelle lock()

L lk(m, b);

Construit un objet lk, associe le mutex m et si b, appelle lock()

II-B-3. Le concept de TryLock

Ici, on ajoute la méthode pour tenter un blocage.

Expressions

Effets

lk.try_lock()

Lève boost::lock_error si locked(). Tente de bloquer le mutex, et lève une exception si le mutex est bloqué par un autre thread. S'il s'agit du même thread, la réaction dépend de la stratégie du mutex. Retourne true si le blocage a été effectué, false sinon.

II-B-4. Le concept de ScopedTryLock

On ajoute donc à un ScopedLock le concept de TryLock.

Expressions

Effets

L lk(m);

Construit un objet lk, associe le mutex m et appelle try_lock()

L lk(m,b);

Construit un objet lk, associe le mutex m et si b, appelle lock()

II-B-5. Le concept de TimedLock

Outre les objets des autres concepts, un objet t de type boost::xtime doit être ajouté. Il spécifiera le temps pendant lequel le blocage sera tenté.

Expressions

Effets

lk.timed_lock()

Lève boost::lock_error si locked(). Tente de bloquer le mutex pendant le temps t. S'il s'agit du même thread, la réaction dépend de la stratégie du mutex. Retourne true si le blocage a été effectué, false sinon.

II-B-6. Le concept de ScopedTimeLock

On fusionne à nouveau les ScopedTryLock et TimedLock.

Expressions

Effets

L lk(m,t);

Construit un objet lk, associe le mutex m et appele timed_lock(t)

L lk(m,b);

Construit un objet lk, associe le mutex m et si b, appelle lock()

II-B-7. Résumé des lock

Concept

Dérive de

Modèle

Lock

   

ScopedLock

Lock

boost::mutex

   

boost::recursive_mutex

   

boost::try_mutex

   

boost::recursive_try_mutex

   

boost::timed_mutex

   

boost::recursive_timed_mutex

TryLock

Lock

 

ScopedTryLock

TryLock

boost::try_mutex

   

boost::recursive_try_mutex

   

boost::timed_mutex

   

boost::recursive_timed_mutex

TimedLock

TryLock

 

ScopedTimedLock

TimedLock

boost::timed_mutex

   

boost::recursive_timed_mutex

II-C. Les threads

La partie la plus intéressante puisque sans elle, la bibliothèque ne sert pas à grand-chose. Les threads peuvent être regroupés en groupe de threads. Toutes ces classes sont non copiables.

II-C-1. La classe thread

La classe thread propose juste ce qu'il faut.

II-C-1-a. Constructeurs et destructeur

Le constructeur par défaut crée un objet représentant le thread d'exécution courant. L'autre constructeur, le plus utile, prend en argument un boost::function0<void> qui encapsule en fait un pointeur vers une fonction ne prenant aucun argument. Naturellement, la première forme, représentant le thread courant, ne peut pas être « rejoint », tandis que la deuxième forme oui, logiquement. Qu'entend-on par rejoindre ? En fait, le thread courant stoppe son exécution jusqu'à ce que le thread rejoint finisse.

La destruction de l'objet n'interrompt pas son exécution, celle-ci se détache complètement de l'objet.

II-C-1-b. Les comparaisons

Deux opérateurs existent, operator== et operator!= qui retournent true – respectivement false – si les deux threads représentent la même unité d'exécution, et false dans le cas contraire – respectivement true.

II-C-1-c. La méthode join()

Cette méthode permet à un objet thread d'être rejoint, donc le thread courant sera bloqué jusqu'à la fin du thread rejoint.

II-C-1-d. Quelques fonctions statiques

La première fonction statique est sleep qui prend en argument un objet de type boost::xtime indiquant combien de temps le thread courant sera mis en pause.

La seconde fonction statique est yield qui remet le thread courant dans l'état Ready, l'état dans lequel ce qu'on appelle le scheduler choisit le thread qui continuera son exécution.

II-C-2. La classe thread_group

Le groupe de threads permet de gérer des threads nécessitant un traitement commun - par exemple, des threads travaillant sur les mêmes ressources -. La construction crée un groupe de threads vide tandis que la destruction détruit chaque thread géré par le groupe.

La fonction create_thread crée un nouveau thread à partir d'un boost::function0<void>, l'ajoute au groupe et renvoie un pointeur vers le thread créé. Avec add_thread, on peut ajouter un pointeur sur un thread, tandis qu'avec remove_thread on le retire. join_all appelle join sur chaque thread dans le groupe.

II-C-3. Une classe bien particulière : thread_specific_ptr

Cette classe bien particulière permet de stocker dans un seul objet plusieurs pointeurs, en fait un par thread. Lors de la destruction d'un thread, le pointeur associé est détruit à l'aide d'une fonction que l'on peut spécifier. Elle peut servir dans le cas de portage d'une interface vivant auparavant dans un environnement monothreadé, ou si chaque thread doit accéder à des ressources physiquement uniques, mais accessibles à travers un point d'accès global – par exemple si on lance plusieurs fois une même fonction en parallèle –.

Un des constructeurs prend en argument un void (*cleanup)(void*). Cette fonction est appelée à la destruction de l'objet pointé lors de la destruction du thread. On peut aussi passer le pointeur NULL permettant de ne rien effectuer.

La fonction release cède la gestion du pointeur et le renvoie à la fonction appelante. La fonction reset permet de changer le pointeur à gérer pour le thread courant tout en appelant la fonction chargée pour le nettoyage.

Les fonctions get, operator-> et operator*()() retournent le pointeur géré par l'objet pour le thread courant, sauf pour operator*()() qui retourne en fait une référence et donc qui nécessite d'avoir un pointeur géré non nul.

II-D. Les autres classes et fonctions

II-D-1. La classe xtime

Cette classe est dépendante de la plateforme. Pour remplir une structure xtime, on passe à la fonction xtime_get un pointeur ainsi qu'un entier clock_type qui sera retourné si la fonction réussit. Cet entier fait partie de l'enum xtime_clock_types.

II-D-2. La fonction call_once

Cette fonction permet d'initialiser une ressource correctement dans un environnement multithread. Elle prend en argument un pointeur sur une fonction ainsi qu'un drapeau par référence qui indique si la fonction a été appelée ou pas.

Exemple d'utilisation
Sélectionnez
boost::once_flag once = BOOST_ONCE_INIT;

void init()
{
    //...
}

void thread_proc()
{
    boost::call_once(&init, once);
}

II-D-3. La classe barrier

La classe barrier permet à plusieurs threads de se synchroniser. Le constructeur prend une taille en paramètre qui est le nombre de threads à attendre.

II-D-4. La classe condition

Une classe importante, mais difficile à exploiter.

Quatre fonctions wait existent. La première libère le mutex associé au lock donné en paramètre, bloque le thread en attendant l'appel à notify_one et rebloque le mutex. La deuxième effectue la séquence précédente si le deuxième argument peut être converti à true. Le troisième prend comme deuxième paramètre un temps xtime et retourne true si ce temps est atteint. La dernière est une combinaison des précédentes fonctions.

Les fonctions notity_one et notify_all permettent de libérer un ou tous les threads en attente de la condition.

III. Exemples

Quelques petits exemples de fonctionnement.

III-A. Un exemple simple

Comment créer un thread qui exécute une fonction particulière ?

 
Sélectionnez
#include <boost/thread/thread.hpp>

void uneFonction()
{
    boost::thread unThread(&uneAutreFonction);
    
}

III-B. Un exemple plus complexe

On va créer une fonction qui sera lancée en parallèle plusieurs fois.

 
Sélectionnez
#include <boost/thread/thread.hpp>
#include <boost/thread/thread_group.hpp>

#include <vector>

// Une variable globale qui pourra être encapsulée au besoin
boost::thread_specific_ptr<int> value;
// Une variable globale avec son mutex, le tout devrait être dans une classe englobante
std::vector<unsigned int> traitement;
boost::mutex mutexTraitement;

void uneFonctionPlusieursThreads()
{
    {
        boost::mutex::scoped_lock lock(mutexTraitement);
        // Accède aux données de traitement en toute sécurité
    }
    value.reset(new int); // On crée des données spécifiques au thread
    
    // Traitement sur value
}

int main()
{
    boost::thread_group group;
    for(unsigned int i = 0; i < 10; ++i)
    {
        group.create_thread(&uneFonctionPlusieursThreads);
    }
    group.join_all();
}

IV. Conclusion

Cette bibliothèque n'est pas encore aboutie, il manque encore beaucoup de choses comme des stratégies plus évoluées pour les mutex, mais on peut espérer que l'évolution de la bibliothèque ira dans le bon sens. Certains mutex ont été supprimés depuis quelques versions à cause de blocages – les mutex boost::read_write_mutex encore présent en partie dans la documentation –, la preuve qu'il est difficile de concevoir une telle bibliothèque.

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Références

Boost.org
Introduction à Boost
Installation de Boost sous Visual C++ 2005 (Aurélien Regat-Barrel)
Boost.Array : les tableaux de taille fixe (Alp Mestan)
Boost.Conversion : les conversions non numériques
Boost.FileSystem : le système de fichiers
Boost.Graph : l'implémentation des graphes
Boost.PropertyMap : les Property Maps
Boost.Random : les nombres aléatoires
Boost.SmartPtr : les pointeurs intelligents
Boost.StaticAssert : les assertions statiques
Boost.Threads : l'utilisation de threads

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